Jeudi 22 novembre 2012 à 14:06

 L'originalité de la moelle de ce qui fit l'amour de nos parents l'un pour l'autre est aujourd'hui un handicap pour nous, leurs enfants. Ils n'ont rien à nous conseiller puisqu'ils n'ont jamais eu à se battre pour un amour que l'on pense traditionnel et normal. Nous sommes les rejetons de la chance du hasard. Livrés à nous mêmes, la famille nous est étrangère et les bons choix ne nous ont jamais été enseignés. Nous sommes une fratrie construite sur la chance et survivant sur le vide de ses qualités et savoirs-faire. Rien n'avance pour ceux qui nous suivent.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:17

 Mentir un brin, juste pour souffler le jeu à ceux qui restent. Et les voir se regrouper, se lever, et quitter la table, la chaise, partir ailleurs, vivre leur connivence, comme si chaque instant était la redécouverte des âmes humaines et de ce qui les retient. Les voir vivre, tout autour, avec l'impossibilité d'y apporter quelque chose, d'être quelqu'un. L'impossibilité de tisser ce que je souhaiterai, parce que j'ai décidé que je n'y parviendrai pas, parce que j'ai su, j'ai su que ce ne serai pas mon rôle. Et mentir afin de se dédouaner du mieux, pour lui et pour soi-même. Je suis en pierre, un statue, de celles qui dégoulinent, quand personne ne regarde, qui ne peuvent tourner la tête vers les yeux assis à côté. De ceux qui savent que leur attitude est la laideur incarnée, mais qui se sentent rouillés d'être, las de poursuivre, et n'arrivent plus à bouger vers une direction appropriée, en un quelconque mouvement de beauté. Mentir toujours, afin d'en sortir justifié. Et tout se déroule comme en super 8, tout se saccade et se poursuit, lointain, comme assister au carambolage de son amour-propre, de l'autre bout. Du hublot glacé d'un avion, d'où de minuscules étoiles crépitent. Je ne peux pas m'exprimer, car je n'ai rien à exprimer. Je suis une pierre de sentiments fossilisés, je suis un roc de souvenirs sédimentés. Et je ne crois pas que la mer ne cesse de monter, le mouvement perpétuel est la frustration qui me perfore l'estomac. Cette ancienne étoile, tentant d'aspirer la vie et ses planètes.

Je suis en poudre. Dispersé en miettes d'âmes et de sommeil. Et je roule à 160 km/h.

Bien calé.

Ma peau est transparente, on voit tout.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:16

 Maladresse, et il y a toujours cette main, celle qui s'évade, qui perfore la timidité, qui se perd et se dépose sur une nuque, sur un bras, sur une jambe, sur des mots. Et puis cette impression qu'elle n'existe plus, elle est a fugué vers à un autre état. Virtuel. Un membre fantôme. Un membre qui n'est pas remarqué, qui n'existe pas. Cette main au bout de laquelle on entasse tout, qui nous fuit dans un trop-plein de lacher prise. Cette main désormais lourde mais néanmoins sans portée. Vide d'importance. Car elle n'est pas reçue, car elle n'est pas acceptée. Ce n'est qu'un membre fantôme sur une nuque bien réelle, une nuque qui bouge, se dresse et se lève. Une nuque qui s'échappe. Et une main douloureusement lourde, sacrifiée, qui passe à travers. Et l'on se décide à la laisser retomber. On a beau changer les conditions, les visages et les ampleurs, les conséquences tendent invariablement vers le zéro absolu. La perte.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:16

 C'est un été caché dans ma tête, c'est une fugue improvisée, et ça sent l'asphalte jusqu'au fond de ma gorge. 
J'avance, je roule, kilomètres sur kilomètres, et je ne suis pas seul. On m'accompagne, un sourire en coin, bien calé sur le siège passager. Les yeux mi-clos, le regard au loin, on fuit, le bonheur aux lèvres et les yeux humides. Ce vent qui nous fait pleurer, il nous guide, nous soutient. Avec le coeur prêt à éclater, on se tait, on ne peut faire autrement. On fredonne, tout au plus. Et, puisqu'on a toute la vie devant nous, on crie, on ose le violer, le silence. On se risque à tout détruire. L'important n'est plus l'arrivée, c'est le risque qu'on prend, c'est l'inertie qui l'accompagne. Ce voyage justifie déjà tout. Chaque instant menait à celui-ci, chaque couleur, chaque regard et chaque détail résonnent de perfection. Tout nous a poussé jusqu'ici. On peut lacher prise, en n'ayant sans doute jamais autant été aux commandes.
On oublie l'arrivée. L'arrivée, c'est toujours trop tard.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:16

 Il y a l'odeur du sapin, et il y a son rire autour.
Je ne l'entends pas, il résonne dans son regard. Ses lèvres le traduisent en un mince sourire gêné. Ce sourire gêné qui ne la quitte pas, et que je reproduis .
Il y a la musique, qui s'égoutte, partout dans la pièce. En fines flaques sonores.
La pièce est sombre, la lumière mobile, elle rebondit en tâches de couleur sur les objets. Mouvants. Sur nous. Sur la musique.
Nous sommes trempés, nos cheveux dégoulinent de voix et de bleu, de rouge, de jaune.
Il pleut dans le salon, une pluie chaude et salée, il pleut du son et nous sommes au milieu. Il y a moi, allongé dans un canot de cuir rouge, les yeux éteints, enfin reposés. Il y a elle et le rire dans ses yeux qui bascule sur ses lèvres. Il y a nous, les derniers  naufragés. Une mer de chaleur, de guirlandes et de musique. Les paupières se ferment mécaniquement et les rêves tapissent le réel, ils diffusent le rouge des guirlandes, ils densifient la pluie. 
On ne va jamais vraiment nulle part, mais le voyage en profite.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:15

 


Les gens fuient en rêves innocents. Les mots que l'on se dit. Ceux que l'on cache. Eveillés. On les quitte, la nuit. On les abandonne. Les mots, les gens. Les idées claires. Rien n'encombre un rêve, rien d'autre que ses significations. Les traits tirés en adieux oniriques. Ceux qui arrivent pour la première fois. 

Et c'est comme une transformation, un changement. Un retour au sources, pratiquement. Deux mille quatre . A nouveau blottis dans une torpeur inaccessible. A nouveau blanchit par l'indifférence. Qu'est-on sinon lointains ?

On compense. Avec ce qu'on trouve. Musique. Ciné. Bouquin. On compense. On y croit. Y croît cette torpeur, ce masque de relations, de relative sociabilité. A défaut d'investissement. 

Plus d'investissement.

Et rien ne s'éteint jamais. Aucun interrupteur n'est accessible. Et l'on perd toujours un peu plus, un peu plus loin, ces choses évidentes. Ces pensées lancées à l'intention de. Elles ne sont plus. Enfermées dans cette panoplie d' autosuffisantes palissades successives.

Diverses déceptions passées et futures s'égouttent. Et le vase de déborder.

Les premières fois. On les quitte, on les fuit, dans des trains, réels ou virtuels. Ce sont les trains qui nous sauvent. Ils nous éloignent de ce qui a pu nous atteindre, corroder quelques pierres d'indifférence. Ils nous permettent de fuir notre sur-estimation.

Sur-estimer. Le maître mot. Le vecteur des espoirs et de la déception. Et la maturité d'annihiler toute sensation semblable.

Quelle maturité ? Noyez-moi d'adolescente naïveté, puisque je veux aimer.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:15

 Voici où j'en étais rendu. Là. Et c'est un peu pompeux, parce que ça s'apelle le jardin des plantes. Ben j'étais perdu là-bas, avec du brouillard à tous les étages, si vous me le permettez. Et vous voyez, j'étais sur un banc, mais pas n'importe quel banc, je l'avais bien choisi ce banc, je l'avais cherché, l'endroit le plus en retrait, l'endroit qui serait le moins fréquenté. J'avais eu du mal à la trouver, même. Bref, j'étais sur ce banc, et je pleurais, en fait. Oui c'est vrai que je pleure quatre fois par semaine, mais là c'était pas pareil parce que ça entraînait pas de soulagement. Non. Il paraît que la composition chimique des larmes est différente si ce sont des larmes de tristesse ou des larmes de joie, mais la composition de ce genre de larmes, difficile à l'imaginer. C'est comme des vieilles larmes, vous savez, des larmes des placards du grenier. Je suis sûr qu'on peut y trouver de la poussière et sans doute un peu de naphtaline. Voire même des crottes de souris. C'est bizarre d'y penser. Je pense trop, c'est vrai. Je suis comme ça, j'y peux rien. Enfin, c'est un peu trop facile. Mais bon, je suis un garçon qui imagine trop de trucs, et tout. Moi j'ai pas envie, hein, de pleurer sur des bancs, de pleurer sur mon passé et sur mes regrets, j'ai pas du tout envie, même. Je suis pas maso, j'aime pas pleurer. Surtout quand ce qui me fait pleurer c'est de ne pas avoir pleuré. Vous voyez le genre, le gars compliqué, le genre à dérouler tout le scotch et à essayer de reconstituer le rouleau après-coup. On peut pas, c'est forcé, ça colle partout et ça nous énerve, et on finit même par en pleurer, et tout. C'est comme quand le chateau de cartes tombe mais que c'est la faute de personne d'autre. C'est juste notre faute à nous parce qu'on a respiré trop fort parce qu'on était content. Et la maison des petits cochons s'est envolée, pourtant on les aime bien les petits cochons. Là on pleure parce qu'on peut pas se taper dessus, ça fait trop stupide, en fait. C'est des larmes comme ça, quand on pleure parce qu'on sait pas comment on peut se faire du mal autrement. Enfin bon je pleurais sur mon banc, comme on pleure sur un bateau, vous savez. Non en fait vous savez pas, je sais pas vraiment moi-même, mais j'avais le mal de mer quand même, alors mettons que c'était un bateau, le banc. Pis moi ce que je voulais, c'était juste qu'il y ai quelqu'un, en fait, et je me l'imaginais déjà. Ca aurait été une femme genre un peu pincée, working girl, vous voyez le genre. Et elle aurait été sans gêne: elle se serait assise à côté de moi. On s'assoit pas à côté d'un mec qui pleure, c'est pas des choses qui se font, et puis de toute façon on pense toujours que c'est contagieux. Mais elle elle s'en fout, elle s'asseoit à côté de moi. Et elle me regarde avec son air sévère, là. Je suis sûr qu'elle se veut un air de compassion, mais elle peut rien faire d'autre que froncer les sourcils et pincer les lèvres. Bon, moi je peux dire, avec mes yeux gonflés et mes levres tremblantes, et puis mes chansons tristes dans la tête. Enfin bon, je l'aime pas cette nana, pas du tout. Mais je suis content qu'elle soit là, pis elle pourrait même me passer un mouchoir, si elle est polie. J'aime bien qu'elle soit là, parce qu'on est deux personnes différentes, et on s'aime pas. Et parce que quand je suis parti, je suis sûr qu'elle a continué à penser à moi sans s'en apercevoir.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:14

 Je passe mes jours à attendre la bonne heure pour pouvoir me coucher. Les différentes tâches et "loisirs" que je m'offre ne sont que prétexte à remplir ma journée, histoire de raccourcir l'attente. Je n'en tire absolument aucune joie, aucun sérénité et aucun intérêt. J'ai envie de vivre, mais je sais pas comment faire. Alors je dresse des plans sur la comète, à rêver de voyages impossibles, parce que les choses impossibles, ce sont les seules qui ne s'enlaidissent pas dans mon esprit. Dès que j'obtiens, je déteste. Dès que je m'y rends, je m'ennuie. Dès que je vis, je veux fuir. Je suis un malheureux chronique à la personnalité périmée, je ne suis plus capable du moindre trait d'humour et du moindre émerveillement. Tout me paraît indolore. Je suis le nuage de fumée au milieu des nuages de poussière.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:13

 Se ronger les ongles, au dessus d'un néant aquatique. Se les ronger, les voir plonger, sauter le pont, un par un, tourbilloner dans ce vent glacial et impudique. S'appuyer contre la rambarde, ouvrir la main, et admirer un partie de soi s'envoler, danser, et planer, puis tomber à pic. Couler, dans les remous d'un fleuve qui nous est inconnu, qui ne nous appartient pas. Des brins de vie en moins, lancés à tout-vent, abandonnés au dessus d'un pont essentiellement virtuel. D'une barrière dissuasive, vaguement concrète.  Ronger des bouts de soi, les jeter au gré du vent, autour, en recevoir dans les cheveux, dans les yeux, sur les lèvres. S'ebrouer, s'étouffer, cracher, s'effrayer, basculer, s'agripper, sentir la pulpe de ses doigts glisser sur le métal. Tomber.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:12

 Je ne suis pas la forteresse que je laisse paraître, je ne suis peut être pas le présent que je m'efforce d'être. Ce que j'ai changé n'est qu'un infime décalage, je dégouline désormais plus sur le passé que sur le futur. Rien d'autre. Tu me voles mes espoirs et mes futurs. Tu les gobes, les enrobes et les broies. Je ne peux plus t'en vouloir, car je comprends que tu ne sais pas en tenir compte. Mais j'ai aussi appris que l'inconscient n'est pas une excuse. Tu me voles mon bien-être, quitte à parfois le remplacer par un bien être supérieur, reponsant sur un futur non identifié, mais bien trop éphemère. J'ai peur de me tromper. J'ai peur d'être incapable de te suivre car je suis sans doute fou. Fou. Incapable de nuancer, de distinguer les efforts des vengeances, de faire la part entre les bonnes et les mauvaises volontés. Je suis tout entier, un agglomérat de vibrations futiles, crissantes, qui s'envolent et s'écroulent, s'abattent constamment sur moi. Tu m'as batti ainsi. Tel quel. Sans armure. Tu es responsable, et tu n'y es plus pour rien. Tu disparais à même tes songes, les miens ne sont que tambours battants et sanguins, incendies et noyades. Je crains de savoir que tu fais de ton mieux. Je crains de savoir que tu t'y prends tellement mal. Et je crains de ne pas savoir si je préfère que tu changes. Tes efforts sont un doute brûlant et finalement malheureux. L'alcool n'est pas un ami. C'est un adversaire sans volonté, sans conscience de m'accabler. L'alcool, c'est toi.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:11

 
J'ai pas la faculté à remonter le temps, pas même celle de pousser les autres à revivre leurs souvenirs. Je suis à part, perpétuellement en arrière, décalé vers un passé inaccompli, parfois destructeur, souvent excitant. Je n'oublie rien, une phrase, un son, une odeur, et c'est le retour de plusieurs mois d'impressions. Je ne suis pas de ceux qui vivent dans le présent, se prennent en main, remercient le sort de leur offrir une vie calme, concrète et sans bavures trop grossières. Je ne cours pas assez vite, mon esprit est quelques années plus tôt, mon corps regrettant le grain de folie irradiant mes idées et mes mots de l'époque. Je suis devenu générique et inambigu. Profondément ennuyeux et répétitif. Je suis fait de regrets, de mélancolie, et je suis capable de leur reprocher, de lui reprocher, de nous avoir poussés à changer, de nous avoir contraints à sortir par la porte de derrière. Sortir du côté de l'age adulte, choisir son avenir, se débarasser de détails qui font tâche, en assumer d'autres. Je m'evertue à tenter de comprendre que récuperer un passé est impossible, que chaque souvenir participait à une situation, souvent avortée, ou périmée. A comprendre qu'aujourd'hui est aussi un futur souvenir, un futur passé à regretter, un futur besoin à remplir avec de la musique, des odeurs et des images. Je concède au temps ce qu'il est, une fuite linéaire d'instants intrinsèques a priori nés d'une cause à effet occasionnellement véritable. Je conçois que le demi-tour est impossible, et que les rails se dessinent peu à peu, sans permettre d'y voir trop loin, tout en restant ancrés, bien au delà de ce qu'il m'est permi d'observer, derrière moi. J'accepte les changements, je veux bien ne pas être égoïste, j'admets que tout va bien. Mais si tout n'était qu'un même instant, un même temps, une  fusion d'images superposées et d'instants entassés, alors là, tout serait réel.

C'est pas un deuil, c'est un oubli retenu. Je suis content de le ressentir, même si je suis peut-être seul.

Mardi 18 septembre 2012 à 2:07

Masochisme nocturne. Pourquoi m'embarrasser à nier le fait que j'aime sentir l'équilibre chanceler, que j'aime ressentir les absences, les déchirements et les coups du sort ? 

Je n'aime jamais autant que lorsque je perds. 

 Je ne comprends pas pourquoi je ressens. À quoi ça peut bien servir, de ressentir, au fond ? Quelle est l'action que m'intime de produire mon corps lorsque je sens la peur de mourir seul? Que dois-je faire d'autre que me regarder tomber lorsque l'anxiété progresse ? Les sentiments sont les prisons de l'âme. 

 

« L'habitude du désespoir est plus terrible que le désespoir lui-même. » — Albert Camus

 

Samedi 1er octobre 2011 à 4:26

Tout est si calme lorsqu'on plonge dans l'indifférence.
La vie des autres devient moteur de nos vies absentes.
Vivre d'attendre que plus rien ne se passe.
Et oublier son propre chant.
Je veux ignorer. Remettre au lendemain.
Oublier le son de ma voix. 
Je veux être confiné dans un neurone défectueux. 
Et continuer à effleurer du doigt tes dernières preuves de vies.
Tu me manqueras autant que je me manque.
Mais c'est pour le meilleur que je m'évapore.
Devenir un bon soldat.
Et ne pas mourir d'avoir été trop vu. 
 

Jeudi 29 septembre 2011 à 0:00

 Tu sais à quel point j'aimerais ne pas être le mec qui vacille à la vue d'un changement de photo de profil. Tu sais combien j'aimerais ne pas avoir le coeur qui s'emballe au détour de la moindre image inédite. Tu sais bien comment je crève de désirer ne pas être celui qui tape ton nom dans le champs de recherche tellement souvent qu'il suffit d'une seule lettre pour que ta putain de tronche apparaisse. Tu sais pertinemment que j'aimerais que ça soit moi qui sourit, que ça soit moi qui bloque, qui supprime, qui écrase et qui oublie. Tu sais très bien que j'aimerais être celui qui n'y pense plus, celui dont l'éclat suffirait à voir bien au delà de tout ce gâchis.

Mardi 30 août 2011 à 0:49

Tes yeux auraient pu soigner les miens. Je me serais peut-être senti guérir, dans le regard d'un autre. J'aurais pu me penser grand, fort. Peut-être beau.
Les choses ne vont pas dans le sens que j'espère. Jamais. Peut-être est-ce un mal pour un bien : l'alternative la "moins pire". Peut-être qu'on veille sur moi de cette façon. J'ai le droit au moins pire, d'autres ont droit au meilleur. D'autres encore ont droit au pire : je n'ai donc pas le droit de me plaindre. C'est difficile à croire, qu'une couleur puisse soigner. Qu'un reflet puisse guérir. Et comment t'expliquer que ta pupille peut donner vie ?
Soigne ton sourire. Tu as hérité d'un charme instantané, d'une sympathie automatique. Tu n'es pas au courant que tu es le sauveur des âmes. Capable du meilleur, donne leur le meilleur. Ôte leur cet accoutrement de "moins pires" et drape les de meilleur. Donne leur tout ce que je n'ai pas pu leur confier. Utilise donc ton sourire pour les réchauffer. 
Et lorsque je penserai à eux, lorsque je me souviendrai, l'image sera tiède.

Samedi 27 août 2011 à 23:47

 Ces départs sentent bon l'adrénaline, l'imprévu et l'insouciance. Je les collectionne avec la plus grande minutie parce qu'ils sont les choses les plus précieuses que j'ai. Mes départs ont souvent goûté l'échec et avorté mes espoirs. Mais ils sont entraînants, ils me meuvent. Leur importance réside dans les buts qu'ils représentent. Allégories du renouveau, ces trains me ravissent et m'enlèvent. J'attends chaque fois tant de ces nouveaux lieux, de cette nouvelle vie. Je suis toujours tellement pressé de tout résoudre par la suppression, de tout reconstruire après destruction. Ces trains m'enchantent, ils me dirigent vers un futur encore imprévu, vers des chemins aux multiples croisements. Je les chéris, comme je ne tiens à rien d'autre. Ils sont évocateurs d'un possible bien-être, d'un probable éclair et d'un nécessaire changement. Ces départs m'ont toujours déçus, et pourtant je ne les ai jamais regrettés

L'important ce n'est pas à quelle vitesse va le wagon, mais à quelle distance on veut aller. 

Samedi 27 août 2011 à 23:26

 Je suis l'envie. 

Comme la vie des autres est belle, comme elle est douce. Simple.
Tout du moins ils ont cette faculté naturelle, automatique, de donner l'impression de tourner rond. D'aller, venir. De faire.

Je n'ai pas ce don, je n'ai pas la capacité de me donner de l'importance, de me montrer grand et puissant. La moindre comparaison, la moindre remarque, et je suis anéanti. 

Je suis le vide.

Chaque fois, je me regarde dans les miroirs. L'oeil sombre, défiant mon reflet, je le provoque, l'enrage. Et je me résous à le haïr. Je n'endure plus ce regard vide et fatigué qui me fixe et me nargue. Je le rejette, le combats.

À chaque instant, chaque coup d'oeil, je poursuis ma destruction. Un morceau à la fois, je m'étripe, m'asphyxie, me brûle. 

Cette personnalité n'en est plus une. Juste le rôle du jeune paumé.

Au fond, je ne suis même pas cette personne. Ni bon, ni mauvais. Ni important, ni dérisoire. Je ne suis rien. Le néant.

Lorsque je suis seul, ma vie embrasse ma personnalité, et mes jours se passent dans le noir. Maigres et immobiles ils attendent leur heure, contraints à la patience.

 

Je suis la peau. Et il y a longtemps que je ne suis plus les os. 

Samedi 27 août 2011 à 16:46

 Où vont-ils ? 

 

Lundi 22 août 2011 à 20:08

Comment t'expliquer, alors, que rien ne tourne rond ?

Comment te faire comprendre ce qui m'émiette ? 

 

Je voudrais être capable de te crier au face à face le bon terme, le mot exact, qui pourrait te permettre d'intégrer ce qui cloche. Il est pourtant clair que ce mot n'existe pas, que ce mal qui est tabou est imprononçable. 

 

Je ne suis présent qu'à moitié et absent qu'en partie : tu pourrais voir à travers mes os, si tu regardais. Je suis le fantôme d'une personnalité, une apparition d'un être humain il y a longtemps avorté. Je n'existe pas, je suis impalpable. Et je disparais lorsque tu te retournes. Tu ne sais pas me demander, pas plus que je ne sais t'expliquer. C'est un équilibre par défaut, une solution de secours. Tous ces silences vains. Ma vie elle-même semble vaine, parce que j'ai compris. C'est une malédiction. 

 

J'ai compris que l'espoir n'est que le premier nom de la déception. J'ai compris que la déception est la préquelle de la dépression. Pourquoi a-t-on façonné l'esthétique au point de le rendre suffisamment vorace pour qu'il nous dévore tout entiers ? Quel est le bonheur ? Est-il l'antithèse de la laideur ? Le Beau est-il lié à l'intelligence ? Sa perception peut-elle être stupide ? 

 

Comment se justifier, s'excuser, de l'absence de beauté ? 

Que peut combler ces abysses ? 

 

Qu'attendons-nous tous, si patients, qu'il nous arrive ?

Pourquoi personne ne s'est encore jamais levé contre ce genre d'injustices ? 

Vendredi 15 juillet 2011 à 21:24

 Finalement, tu te construis. Sans moi. Dans un autre pays, loin. 

Tu vis la vie que je voulais. Celle que je désire encore, mais je sais n'être pas à même de la mériter. Tu t'organises, petit à petit. Tu deviens quelqu'un, tu t'éloignes de la condition que nous partagions. Tu deviens fort, grand, beau, puissant, certain, convaincu, important. 

Je t'envie. J'ai passé chaque jour à envier, j'ai peur que cela continue irrémédiablement. À jamais. 

Je déteste. Tout. Je suis aigri, tellement. Je souffre. Discrètement. 

Si tu me croisais tu t'imaginerais encore que je suis un bon vivant, une bonne poire, qui voit la vie avec humour et beauté. Or, au contraire, je suis mort. Depuis longtemps. Et je fais semblant de continuer. Pourquoi faire ? Parce que je ne veux pas décevoir plus que je n'ai déçu. Je ne veux pas emporter les gens avec moi. Je veux qu'ils n'y voient rien. Je veux avoir l'air de garder la tête hors de l'eau, de dire "ça va" en leur souriant, tout en sentant que le poids qui m'agrippe m'attire vers le fond. 

Mais malgré moi, je les emporte. Et c'est depuis que tu es parti que tu t'épanouis, depuis que mon influence n'est plus à même de t'enserrer. Je suis contagieux, j'empeste mon entourage jusqu'à le rendre malade. Tu n'es pas le premier qui ait fuit mon emprise et qui s'en est trouvé récompensé. Chacun de vous vit mieux lorsqu'il décide de disparaître de ma vue. 

J'aimerais faire de même. Comment puis-je me laisser tomber ?  

<< Page précédente | 1 | 2 | Page suivante >>

Créer un podcast